lundi 30 novembre 2015

Abd Al Malik - Scarifications (Pias)


Abd Al Malik - Scarifications (Pias)

Abd Al Malik est l'artiste de tous les paradoxes. Accumulant depuis plusieurs années un palmarès de récompenses assez impressionnant, le poète est "lyricalement un stremon" aussi bien capable de citer dans la même phrase Balavoine, Opération Dragon, Amy Winehouse et Albert Camus que d'écrire et réaliser son propre film, ou bien d'admirer Brel, Darc, Téléphone et Radiohead tout en rêvant en secret de bosser en studio avec Quincy Jones et l'équipe de Thriller du King Of Pop Michael Jackson.

Originaire de Strasbourg, le rappeur éclectique fan de Malcolm X, Gil Scott Heron et The Last Poets dépoussière et rafraîchit l'image d'un hip-hop français souvent sclérosé et décérébré, en y injectant avec son slam fracassant des textes sophistiqués, parfois engagés et toujours raffinés.

 Le premier effort solo nommé Le Face à Face des Coeurs, sort en mars 2004, il est alors considéré comme un élan d'amour face la haine...

 Gibraltar, second opus, paru en 2006 assoit véritablement l'artiste dans le paysage musical hexagonale, son rap riche et son "flow de dingue" le projettent même en tête des charts notamment grâce au titre éponyme. Il marque aussi la rencontre d'Abd Al Malik avec le compositeur et pianiste de Jacques Brel, Gérard Jouannest, et de son épouse Juliette Greco, icône de la chanson française (qui croisa la route de Gainsbourg, Miles Davis ou Brassens) devenue complice de l'héritier des pionniers du rap US "old school" Big Daddy Kane et Rakim.

 Après l'écriture et la réalisation de son premier long métrage autobiographique intitulé Qu'Allah Bénisse la France (diffusé en salle en 2014), au cours duquel il fait la connaissance du producteur/DJ français Laurent Garnier, il publie son cinquième album baptisé Scarifications... 5 ans qu'il se faisait attendre, depuis Château Rouge en 2010 enregistré avec Chilly Gonzales... Et forcément il devait être à la hauteur! 

La complicité liant le pâpe de la techno française au rappeur est d'emblée frappante, avec Bilal (frère et partenaire de studio du slameur philosophe), ils forment un combo incisif et redoutable. Les ambiances de Scarifications sont parfois sombres et pesantes voire inquiétantes, l'artiste y fait son introspection et nous raconte son adolescence de dealer et de voleur à la tir, marquée au fer rouge par la violence de son quartier de Neuhof et la mort de ses amis victimes d'overdose. Ce disque très personnel est la confidence urgente, rageuse et fascinante d'un homme conscient de ses failles; mais renforcé par ses erreurs il se dresse fièrement dans "ce monde qui est une tombe". Le slam d'Abd Al Malik y laisse sa peau au profit d'un rap underground pressant et tranchant.

Les pulsations digitales de Garnier plongent l'auditeur dans l'obscurité, ses nappes de synthés et de drone glaçants et ses rythmiques dubstep l'enveloppent mais ne l'étreignent pas. Ces instrus fracturées sont aux antipodes des productions électro pop mainstream positives et superficielles, les beats y sont lourds et assommants autant que les mots qui écorchent et atteignent leur cible en pleine tête. Les quartiers chauds de Strasbourg battent aux rythmes de la techno de Détroit, un  accord osé qui fonctionne mais qui intrigue!
 


Paroles et Musiques : Abd Al Malik – Bilal – Laurent Garnier

PAROLES :

C’est soit le deal soit c’est l’usine
Grandir dans un monde ou l’altérité est assassine
Diplômé de la rue une autre vie estudiantine
La même couleur mais pas le destin de Lamartine
Si on s’arrête un instant que nous enseigne-t-on
On s’en sort si on le veut vraiment
J’ai poussé ma réflexion le soleil était absent
Je me suis fait pluie en attendant
Mais tout prend l’eau trop de mecs nous bassinnent
C’est comme dans Matrix le règne des machines
Du rap ne subsiste que le bacchique
La mort de Pavlos Fyssas est-elle un hic
Mais rien n’est illogique de la crise naissent tous les fascismes
Classique l’Histoire ne se répète pas mais rime
Abîme toujours les mêmes drôles de mise en abîme
Effets miroirs toutes les vies comestibles
Ghettos Ter Ter et guerres intestines
Je suis né dans le pays de la guillotine
Muslim et Noir de peau qu’est-ce qui me détermine
Qu’est-ce qui se joue dans ma poitrine
Mon cœur cesse de battre parfois c’est la routine
Est-ce donc ça qui discrimine
Je n’entérine aucune nouvelle doctrine
Ne suis-je pas un enfant de la république
Hun Hun de la République
Lyricalement j’suis un stremon
J’suis un stremon…

Michael Felberbaum – Lego (Fresh Sound New Talent/Socadisc)


Michael Felberbaum – Lego (Fresh Sound New Talent/Socadisc)

Le guitariste italo-américain Michael Felberbaum nous présente son cinquième opus jazz baptisé Lego. Entouré du pianiste Pierre de Bethmann, du bassiste Simon Tailleu et du batteur Karl Jannuska, il nous invite à pénétrer son puzzle sonore sophistiqué qui, pièces après pièces, dévoile une identité musicale complexe au lyrisme économe mais hypnotique voire psychédélique. S'il fallait décrire son jeu, il faudrait alors le confronter à celui des deux maîtres de la guitare jazz moderne, Jim Hall d'un côté et John Scofield de l'autre. Deux techniques aux sonorités opposées, l'une est sensuelle, délicate et fluide, l'autre plus rugueuse et bluesy. Malgré cette dualité et une élaboration savante de ses 9 compositions faites de motifs rythmiques et mélodiques qui s'entrelacent et se superposent, Michael a su insuffler des nuances rassurantes et captivantes de groove (Variations), de bossa nova (Now), de blues et de rock (Mint) voire même quelques reflets andalous, dans sa ballade poignante Nostalgia.

mardi 24 novembre 2015

Philippe Petrucciani & Nathalie Blanc – Remember Petrucciani (Jazz Village/Harmoia Mundi)


Philippe Petrucciani & Nathalie Blanc – Remember Petrucciani (Jazz Village/Harmoia Mundi)


Magnifique célébration d'un pianiste surdoué que ce tendre Remember Petrucciani. Philippe, guitariste et compositeur tombé tout jeune dans la marmite du jazz avec ses frangins Michel et Louis (contrebassiste), revisite le répertoire de son frère disparu à New York voilà plus de 15 ans, accompagné de la chanteuse Nathalie Blanc, une habituée de la famille. Cette dernière a écrit des paroles pour 12 titres initialement instrumentaux, qu'elle interprète avec élégance et maîtrise sur les arrangements soignés et soyeux du guitariste au swing subtile des plus classieux. L'album nous invite à redécouvrir des thèmes emblématiques du pianiste de génie parés d'une voix envoutante, de textes personnels et d'orchestrations intimistes. Renforcés par une excellente section de cuivres (Bosso, Cantini et Castellani), les fidèles acolytes Dominique Di Piazza à la basse (remplacé à la contrebasse par Michel Zenino) et Manhu Roche à la batterie sont eux aussi embarqués dans l'aventure menée humblement par un Philippe Petrucciani fin mélodiste et rythmicien aguerri.

dimanche 22 novembre 2015

Fresh Sounds from Les Chroniques de Hiko (November 15 Week 03)

Juste un petit tour du côté des dernières actualités musicales abordées dans mon blog Les Chroniques de Hiko... Olivier Bogé, Claptone, Thierry Maillard, Anne Carleton, Fred Pallem & Le Sare du Tympan, Madlib, Oxmo Puccino, Jonathan Orland & Nicola Cruz.


vendredi 20 novembre 2015

Thierry Maillard – The Kingdom of Arwen (Naïve)


Thierry Maillard – The Kingdom of Arwen (Naïve)

Il y a des disques qui mettent l’eau à la bouche avant même de les avoir joué, The Kingdom of Arwen, dernier opus du pianiste Thierry Maillard, en fait partie avec son casting bluffant parmi lequel se dégagent quelques invités prestigieux aux couleurs musicales singulières : le guitariste Nguyên Lê, le percussionniste Minino Garay ou le joueur de doudouk Didier Malherbe.

Mais loin d’être arrivés au bout de nos surprises, lorsque Hiéroglyphes s’ouvre avec la cacophonie du Prague Concert Philharmonic qui s’échauffe, on entrevoit alors le projet chers au compositeur de rassembler dans 12 pièces épiques au lyrisme grandiloquent, un trio jazz et un orchestre symphonique. Certes le concept n’est pas nouveau, mais la particularité de ce dernier est d’y avoir adjoint une section d’instruments ethniques. Entouré de Dominique Di Piazza à la basse et de Yoann Schmidt à la batterie, l’arrangeur n’en n’est pas à son coup d’essai puisque l’an dernier il publiait The Alchemist, enregistré avec un Orchestre de Chambre et des musiciens appartenant à la sphère world music. 

En toute logique l’étape suivante devait être  son Kingdom of Arwen et qui d’autre que Jan Kucera aurait été plus à même de diriger l’orchestre ?

Ainsi jazz, musique classique et musique du monde s’entremêlent avec maestria dans une épopée fascinante dont les références sont aussi bien puisées chez Tolkien ou Franck Zappa (Zappa) que dans l’Antiquité grecque (The Legend of Sparta’s King) égyptienne (Sphynx Part.1 et Part.2) ou le folklore scandinave (Le Monde des Elfes).

Flûte chinoise, arménienne (doudouk) et irlandaise (whistle par Neil Gerstenberg), luth grec (baglama par Taylan Arikan) percussions, violoncelle (par Olivia Gay) et guitare électrique… Un ensemble qu’il faut accorder avec la rigueur d’un orchestre symphonique et la créativité d’une formation de jazz. Il s’avère que malgré tout ce petit monde à s’occuper, il manquait à Thierry un instrument plus organique, la voix céleste de Marta Klouckova s’imposa alors à lui dans Sphinx Part.1, qui nous emmène en Orient ou en terre Celte, difficile d’y accoler une étiquette.

Fred Pallem & Le Sacre du Tympan – François de Roubaix (Train Fantôme/L'Autre Distribution)


Fred Pallem & Le Sacre du Tympan – François de Roubaix (Train Fantôme/L'Autre Distribution)

Déjà salué mainte fois et notamment dans l’excellente compilation Cinemix Vol.1 paru en 2003 et qui rassemblait une série de reworks de célèbres titres extraits de BOF françaises des années 70 , le répertoire du compositeur de musique de film François de Roubaix ne cesse de faire des émules, on se souvient entre autres du remix des cultissimes Dernier Domicile Connu ou La Mer est Grande que nous offraient respectivement Gonzales et Carl Craig, c’est aujourd’hui au tour du bassiste Fred Pallem de rendre hommage à l’emblématique compositeur disparu tragiquement en 1975 à l’âge de 36 ans.

Entouré de sa fameuse formation Le Sacre du Tympan, qu’il crée en 1998 sur les bancs du Conservatoire Supérieur de Musique de Paris, sa démarche artistique est de fusionner les musiques dites "populaires" (pop, rock) et celles considérées comme "savantes" (jazz, musique contemporaine). Dans son premier projet intitulé Le Sacre du tympan sorti en 2003, Fred Pallem croisait les influences des jazzmen Charles Mingus et Duke Ellington à celles du chansonnier Georges Brassens, du groupe rock anglais The Shadows, du compositeur américain Charles Ives et de l'italien Nino Rota. Ce mélange de sonorités et de références et cette volonté de convoquer des images allaient façonner l'identité musicale décapante du big band décalé et énergique, qui s'attaque aujourd'hui à un monument parmi les compositeurs du 7° art. L'aspect cinématographique ayant toujours été une dominante chez Fred, son précédent Soundtrax en est la preuve, relire l'œuvre d'un pionnier de l'électro et du home studio comme François de Roubaix est pour lui une aubaine et l'occasion de déballer ses vieux synthés vintages et autres instruments plugged.

Pour fêter l'anniversaire de sa disparition en mer voilà 40 ans, le Sacre du Tympan s'attèle, avec un penchant électronique, à revisiter ses thèmes les plus parlants comme celui du chef d'œuvre de Serge Korber L'Homme Orchestre ou des génériques de l'émission d'Elizabeth Tessier Astralement Vôtre et de la série policière Commissaire Moulin.

Si Un Tank Pour l'Aventure est traité comme un standard de jazz, L'Altelier l'est comme un tube psyché rock et Je Saurais Te Retenir une ballade aux reflets folk sublimée par les voix d'Alexandre Chatelard et Alice Lewis (habituée du Sacre).

Dans le très beau Boulevard du Rhum, titre d'un film de 1971 joué par Lino Ventura et BB, Fred a convié une autre chanteuse, elle aussi singulière dans le paysage de la nouvelle chanson française, Barbara Carlotti, qui interprétait en 2012 Mon Dieu, Mon Amour avec un autre invité de marque, le fantaisiste et génial Philippe Katerine qui intervient ici dans Chapi Chapo, un air semblant lui être prédestiné, qui était le générique de la série d'animation culte de la deuxième chaîne de l'ORTF. Juliette Paquereau (elle aussi régulière du Sacre), de Diving With Andy groupe pop anglophone, apparaît quant à elle dans le très aquatique Ariadne Thread.

Bref, un casting pointu particulièrement bien fourni comme d'habitude, on se souvient du plateau de guests dans La Grande Ouverture avec Sébastien Tellier, Piers Facini, Matthieu Chedid ou Sansévérino. Mais que serait le Sacre sans son ossature, composée du batteur Vincent Taeger, du saxophoniste Remi Sciuto, des claviéristes Vincent Taurelle et Arnaud Roulin ?

Le Sacre du Tympan parvient une fois de plus à souligner les mélodies intemporelles, fortement marquées par l'esprit clairvoyant et innovant de compositeurs hors normes, ainsi François de Roubaix revient d'outre-tombe grâce à l'inventivité et aux arrangements d'un musicien décomplexé.

jeudi 19 novembre 2015

Olivier Bogé – Expanded Places (Naïve)

Olivier Bogé – Expanded Places (Naïve)
Le multi-instrumentiste français Olivier Bogé nous offre son troisième opus baptisé Expanded Places. Pianiste converti au saxophone depuis la fin de son adolescence, il affiche un certain nombre de collaborations prestigieuses avec des acteurs majeurs de la scène jazz contemporaine dont la dernière en date avec l’arménien Tigran Hamasyan dans The World Begins Today.
Nous livrant un jazz cinématique très aérien et aéré, le musicien trentenaire a pris soin de composer 9 titres aux reflets impressionnistes qui malgré leurs ambiances respectives se complètent et s’harmonisent. Accompagné de Nicolas Moreaux à la contrebasse et de Karl Jannuska à la batterie, il forme un trio équilibré et vigoureux aussi bien à l’aise dans des variations rythmées au lyrisme puissant (Beyond The Valley Of Fears) que dans des flâneries au tempo lent et aux mélodies plus intimistes parfois baignées d’une douce mélancolie (What People Say). La formation est enrichie des participations discrètes mais essentielles  de Guillaume Bégni au cor et de Manon Ponsot au violoncelle.
Olivier y a enregistré toutes les parties de saxophone, mais aussi de piano, de fender rhodes et de guitare (remarquable dans le radieux The Fairy & The Beard Man), il se mue même parfois en choriste comme dans l’ouverture Red Petals Disorder, morceau qui annonce d’emblée la teneur de l’album, mêlant au jazz les sonorités envoutantes et métalliques de la folk et les combinaisons orchestrales et majestueuses de la musique classique (je pense à certains travaux de Keith Jarrett ou de Brad Mehldau).
A l’image des noms qu’il a donnés à ses pistes, l’artiste nous invite à un voyage hors du temps, le long d’une route où défilent de vastes panoramas à la beauté touchante et hypnotique. Expanded Places s’immisce alors dans nos esprits à la manière de la bande originale d’un film imaginaire, dont sa mise en scène serait déterminée par l’auditeur.
Sublime coup de coeur !
 



 

Claptone – Charmer (Different/Pias)


Claptone – Charmer (Different/Pias)

Déjà repéré depuis un certain temps grâce à ses excellentes productions, il s’est récemment fait remarquer grâce à ses remixes bodybuildés (je pense notamment à sa version punchy du succès Liquid Spirit du jazzman Grégory Porter ou bien de sa réappropriation d’Omen des frangins Disclosure) destinés aux dancefloors exigeants, férus de beats down tempo bien produits. Désormais partie intégrante du paysage électronique mainstream, l’allemand Claptone s’essaye au long format avec son premier opus paru chez Différent Recordings et distribué par Pias, Charmer. Composé de 13 titres où sont invitées quelques unes des pointures du rock indépendant Nathan Nicholson (UK), Peter Bjorn & John (Suède) et Clap Your Hands Say Yeah (USA), de l’électro Jay Jay Johanson (Suède) et Jaw (FR) ou de la pop Young Galaxy (Canada), le Dj producteur nous offre même une collaboration de haut vol avec le dandy pop finlandais Jimi Tenor sur un titre efficace, sensuel et funky intitulé Party Girl.

L’animal Claptone se laisse difficilement apprivoiser, en effet il se dissimule derrière un inquiétant masque en forme de bec de vautour (que portaient les médecins bec durant les épidémies de peste bubonique en France et qui inspira ensuite un personnage de la comedia dell’arte), emblématique du carnaval de Venise. Ainsi grimé il se permet toutes les audaces devant ses platines, distillant un son deep-house orienté chill/pop, où la voix et le chant y occupent une place importante.

Certains regretteront peut être ses premières productions plus underground comme Night On Fire qu’il sortait en 2012 sur Exploited et Cream la même année sur Defected, cependant d’autres apprécieront ses atmosphères estivales qui se rapprochent des sonorités de Feder, Milky Chance, The Avener ou Robin Schulz, qui ont animées les chaudes soirées de nos plages azuréennes l’été dernier.

Le titre phare de Charmer est sans conteste No Eyes, qui n’est d’ailleurs pas d’hier puisque la version maxi sortait en 2012, un hit en puissance que l’on entendra résonner cet hiver en before, Jaw y déploie sa voix soul légèrement granuleuse injectant à l’ouvrage un groove imparable.

Claptone a conçu des mélodies catchy qui font mouche dès la première écoute, bien que trop consensuel à mon goût, il nous délivre un effort plutôt réussi.

mercredi 18 novembre 2015

Nicola Cruz - Prender El Alma (ZZK Records)


Nicola Cruz - Prender El Alma (ZZK Records)

Le jeune producteur franco-équatorien Nicola Cruz nous présente son premier opus Prender El Alma, sur ZZK Records (label qui nous offrait il y a peu l’excellent projet La Yegros). Mêlant les sonorités acoustiques des percussions traditionnelles, des chants tribaux, des flûtes indiennes et autres guitares andines à ses textures électroniques nappées de synthés délicats et rythmées par un groove organique down tempo des plus prenants, il rapproche de façon singulière la richesse des influences indigènes précolombiennes aux possibilités infinies de la production musicale numérique contemporaine assistée de ses séquenceurs, boites à rythmes MPC et autres logiciels Ableton…

Né à Limoges mais installé à Quito, capitale de l’Equateur située sur les flancs du volcan Guagua Pichincha, le petit protégé du prodige américano-chilien Nicolas Jaar a voulu revenir à l’essence même de ses origines et rendre un hommage vibrant et intimiste à la Nature et à ses ancêtres.

Percussionniste de formation, il est depuis ses débuts marqué par « l’aspect mystique qu’offrent les percussions du monde entier », il intègre alors la dimension du rituel à ses constructions sonores. Orientant rapidement sa pratique vers l’électro, il étiquette son trip wolrd bass d’Andes Step ou d’Andes Infused Electronica, un mouvement à mi-chemin entre tradition et modernité qui fera sans doute des émules parmi la scène électronique sud américaine florissante (Dj Raff du Chili, Siete Catorce de Mexico…)

Avec ses échantillons de sons analogiques prélevés avec soin, découpés puis mis en boucle, Nicola parvient à restituer sa vision d’une culture mal connue et rarement sublimée par l’electronica. Nourri de cumbia et autres folklores locaux voisins, il s’inspire des démarches artistiques du méxicain Murcof (qui collaborait il y a quelques années avec Erik Truffaz sur le projet Rendez-vous), des anglais Matthew Herbert et Quantic (Will Holland a d’ailleurs longtemps séjourné et travaillé en Colombie) ou de l’américain Philipp Glass (…) pour nous proposer un voyage plus anthropologique que touristique. La voix des chanteuses Huaira (compagne du producteur) et Tanya Sanchez participe à nous immerger dans cette exploration « des mythologies ancestrales vues par le prisme du monde moderne », immersion amplifiée par les rythmiques répétitives hypnotiques et les efforts particuliers à bâtir des structures instrumentales sonnant « comme si un groupe était en train de les jouer ».

Une belle surprise et une magnifique découverte !

lundi 16 novembre 2015

Anne Carleton – So High (Quart de Lune/Rue Stendhal)


Anne Carleton – So High (Quart de Lune/Rue Stendhal)

A la croisée de sonorités issues du jazz et de la musique classique, la chanteuse et plasticienne Anne Carleton nous livre un opus envoûtant et singulier intitulé So High.

Entre poésie, slam, chanson et textures électroniques, elle distille avec grâce et tendresse 12 plages délicates gorgées de fragilité, de douceur et de beauté. Parmi ses subtiles compositions ainsi que celles de Jean-Philippe Viret (Le Temps, Confusion) et de Carine Bonefoy (Why Are You Gone), on remarque de sublimes reprises de succès pop, comme l’éblouissant Norwegian Wood de The Beatles et l’aérien Wild Is The Wind, immortalisé par Nina Simone.

Entourée de Laurent Guanzini au piano, de Benoït Dunoyer de Segonzac à la contrebasse, d’Eric Moulineuf au design sonore et d’un quatuor à cordes vibrant, Anne convie quelques invités de cœur dont Ninon Valder au bandonéon, ses deux filles Prune et Ambre au chant, puis l’illustre philosophe Edgar Morin, qui mêle sa voix aux ambiances musicales cinématiques de l’album.

Elle déploie d’une voix cristalline une onde radieuse éclairant des titres puissants et profonds, s’interrogeant et interrogeant différentes personnes sur des thèmes universels tels que l’espoir, la liberté, l’amour, l’enfance ou l’existence…

Une belle découverte !

Jonathan Orland – Small Talk (PJU/Absilone/Socadisc)


Jonathan Orland – Small Talk (PJU/Absilone/Socadisc)

Mêlant son esprit d’aventure inspiré par le jazz moderne aux sonorités d’Europe de l’Est et klezmer, le jeune saxophoniste alto Jonathan Orland publie son second opus intitulé Small Talk. Entouré du contrebassiste Yoni Zelnik, du batteur Donald Kontomaou (fils de la diva Elizabeth) et du guitariste prodige originaire de Salvador de Bahia Nelson Veras, il interprète avec éloquence, exigence mélodique et qualité harmonique 12 titres, dont 8 compositions et 4 reprises.

Après son premier Homes, enregistré en quintet à New York avec d’anciens collègues de promo du Berkelee College of Music où il a étudié auprès de George Garzone et Joe Lovano, il organise régulièrement des sessions avec Yoni puis Donald et de la rencontre avec Nelson naîtra peu à peu l’envie de graver l’interaction et la complicité du quartet en studio d’enregistrement.

Comme l’indique le titre de l’album Small Talk qui se traduit par « conversation légère et spontanée », la liberté est un des maître-mots du projet, chaque musicien exprime sa créativité au travers de thèmes inspirés du répertoire traditionnel yiddish (Reysele de Mordechai Gebirtig) et du folklore des balkans (Be There). Cependant le swing et l’importance de l’improvisation demeurent omniprésents, nous n’avons qu’à écouter Played Twice de Thelonious Monk, For Heaven’s Sake immortalisé notamment par Chet Baker, ou bien Falling Grace du bassiste Steve Swallow.

vendredi 13 novembre 2015

Fresh Sounds from Les Chroniques de Hiko (November 2015 week 01)


Jean-Pierre Como – Express Europa (L’âme Sœur/Absilone/Socadisc)


Jean-Pierre Como – Express Europa (L’âme Sœur/Absilone/Socadisc)

Le pianiste parisien Jean-Pierre Como revient avec son 10° opus baptisé Express Europa. Après Boléro, son hommage aux musiques latines et méditerranéennes paru en 2013, le co-fondateur du groupe jazz fusion Sixun a choisi de redonner (comme à ses débuts avec l’album Padre 1989), une importance toute particulière au chant qui, depuis son enfance passée dans un milieu familiale marqué par la culture italienne, habite son œuvre et accompagne son processus créatif.

Toujours bien entouré, on retrouve près du jazzman ses fidèles acolytes comme le saxophoniste Stefano Di Battista, le guitariste Louis Winsberg (également membre de Sixun) et le batteur Stéphane Huchard, qui figuraient déjà en 1995 dans le projet initial Express Paris Roma, que l’artiste considère encore comme l’un des plus beaux moments de sa carrière. Rejoint par le bassiste Jérôme Regard, le quintet est largement enrichi des voix exceptionnelles de deux crooners, l’anglais Hugh Coltman (The Hoax, Nouvelle Vague, China Moses ou encore Eric Legnini) de l’italien Walter Ricci (David Sauzay, Lucas Santaniello).

Les deux premières plages Stars In Daylight - part 1 et part 2 introduisent les timbres vibrants des chanteurs, ils nous offrent une ballade jazzy aux reflets soul doux et délicats, une splendide chanson survolée par les phrasés puissants et inspirés du saxophoniste italien, habillée des accords acoustiques du guitariste marseillais aux multiples facettes, ainsi que de le touché léger et toujours impeccable de l’immense batteur niçois André Ceccarelli (ici les deux batteurs sont présents !).

Si Hugh Coltman est à l’origine des textes interprétés en anglais, c’est à Walter que l’on doit l’écriture des charmantes Raccontami et Mio Canto, s’alignant avec le penchant naturelle de Jean Pierre Como pour ses racines, une Italie tout autant sublimée dans Musica et Io Che Amo Solo Te, où l’inconditionnel de Sinatra, Bennett et Fitzgerald y exprime toute sa sensualité et son romantisme.

Mandela Forever vient raffermir le swing d’Express Europa avec son tempo soutenu, son efficacité mélodique empruntée au So What de Miles Davis et sa chaleur latine au Samba de Uma Nota So d’Antonio Carlos Jobim.

Le chanteur natif de Bristol nous offre ensuite You Are All et Turn And Turn, deux instants suspendus et intimistes où se rencontrent esprit pop et magie jazz.  Sa voix de velours qu’il module avec brio et sensibilité inonde les compositions de Jean Pierre d’une fragilité touchante, la finesse des arrangements de Pierre Bertrand (Raccontami, You Are All, Musica et Mio Canto) participent bien sûr à rendre ces moments d’écoute uniques et inoubliables !

Louis Winsberg a composé Silencio, aux accents flamenco et Alba, aux saveurs brésiliennes, deux titres où la guitare acoustique omniprésente ajoute une note chaleureuse et conviviale, où chaque instrument trouve sa place entre improvisation et mélodie accrocheuse.

Une citation de Jean Pierre Como en personne résume assez bien Express Europa, décrivant simplement l’ambition du disque :

« J’ai voulu un projet musical ouvert, aux influences multiples. Ce qui me touche dans la pop music, dans la soul, c’est la voix. Je pense à Stevie Wonder, à Peter Gabriel, à Caetano Veloso, à Sting, à Joni Mitchell, à Ricky Lee Jones…»

Magique !



jeudi 12 novembre 2015

David Krakauer – The Big Picture (Label Bleu/L’Autre Distribution)


David Krakauer – The Big Picture (Label Bleu/L’Autre Distribution)

Le dernier projet mené par le clarinettiste David Krakauer nommé The Big Picture se propose de revisiter des thèmes de musiques de films célèbres composés par les géants du genre, les mélodies immuables de Nicola Piovani (dans Life Is Beautiful), Randy Newman (dans Avalon) ou Mel Brooks (dans The Producers), trônent ainsi aux côtés de titres tout aussi emblématiques légués par Sidney Bechet (Si Tu Vois Ma Mère du film Midnight In Paris de Woody Allen, véritable idole pour le musicien), Serguei Prokofiev (March From The Love Of Three Oranges) ou encore Johnny Green (Body And Soul). Mêlant comme à son habitude les sonorités de la musique classique au jazz et au klezmer, l’artiste novateur explore l’identité juive à travers le cinéma moderne américain.

Willkommen, extrait du film Cabaret de Bob Fosse, ouvre The Big Picture et donne le ton, évoquant avec une légèreté apparente et un swing communicatif la montée du fascisme dans les années 30. David aime jouer avec la charge émotionnelle que dégagent ces mélodies touchantes, confrontant souvent l’horreur au comique (Keep It Gay), le déracinement à l’espoir (The Family)… Entouré d’un quintet efficace et réactif, il rend hommage aux icônes juives américaines comme Barbara Streisand dans People tiré de Funny Girl ou Roman Polansky avec Moving From The Ghetto issu du cultissime The Pianist.

A noter la participation dans l’excellent réarrangement de Si Tu Vois Ma Mère, de la contrebassiste Nikki Parrott (Michel Legrand, Randy Brecker, Clarke Terry…), de la guitariste Sheryl Bailey (Richard Bona, Irene Cara…) et du Dj Keepalive.
 

Das Kapital - Kind Of Red (Label Bleu/L’Autre Distribution)


Das Kapital - Kind Of Red (Label Bleu/L’Autre Distribution)

A une époque où l’idée d’Union Européenne n’a jamais autant été remise en question, le trio jazz Das Kapital nous offre un bel exemple de cohabitation et de collaboration entre nationalités voisines. En effet le saxophoniste allemand Daniel Herdmann, le batteur français Edward Perraud et le guitariste danois Hasse Poulsen ont composé l’opus à part égal, 9 titres qui dégagent une énergie communicatrice qui n’est pas uniquement puisée dans le jazz, mais largement enrichie de sonorités folk, rock et pop.

L’évènement déclencheur de ce troisième disque Kind Of Red est un concert de Wayne Shorter donné à Berlin fin 2012, les musiciens se sont imprégnés de sa maîtrise du temps, de la clarté de son jeu, de l’évidence de ses variations et de son art du dialogue. Et comme l’aura de Miles Davis est à jamais accolée à la sienne, il semblait logique au trio de faire un clin d’œil au Kind Of Bue du trompettiste…

Les mélodies sont accrocheuses à l’instar de l’ouverture intitulée Webstern et écrite par le percussionniste nantais, les cordes métalliques et les peux tendues aux timbres étouffés créent une atmosphère acoustique plutôt intimiste, une ballade cependant animée par le lyrisme structuré du sax et l’envolée rageuse de la guitare électrique.

Claudia’s Choice nous plonge dans une ambiance bien différente, aquatique et légèrement dissonante, d’une lenteur étourdissante…

Iris, après une minute d’une ritournelle hypnotique, est porté par un thème de western interprété par Hasse à grands renforts de vibrato… Puis se termine en douceur sous le souffle apaisant de Daniel.

Ce dernier est d’ailleurs à l’origine du sombre Macht Nix, In Der Mitte Ist Noch Platz, on y retrouve les impressions ressenties durant l’écoute de Claudia’s Choice, des accords de guitare plaqués qui s’éternisent, parsemés de quelques coups de cymbales et de quelques notes de sax ébauchant une mélodie brutale et saccadée.

Just Like That se rapproche davantage d’un jazz plus rassurant et d’un swing plus balisé, sax et guitare échangent autour d’une assise rythmique au tempo soutenu.

Pour sa deuxième composition Jenseits Von Gut Und Böse (titre d’un ouvrage de Nietzsche Par delà Le Bien et Le Mal : Prélude d’une Philosophie de l’Avenir), Daniel Erdmann conçoit une longue introduction rythmée par un tic tac abrutissant, puis laisse les accords folk de la guitare prendre le relais, le saxophoniste entame alors une improvisation de près de 2 minutes.

Hasse nous offre ensuite son blues acoustique et dissonant How Long, So Low, une plage musicale dépouillée mais expressive à l’image de l’étrange ballade Nothing Will Ever Be Enough Again, où le silence est d’or et la retenue de rigueur !

L’énergique Au fond des yeux aux airs d’hymne pop/rock de l’époque Woodstock rompt le silence et le calme apparent de King Of Red avec son déploiement de couleurs criardes et saturées…

Bref, Das Kapital accouche d’un disque barré, parfois fluide et parfois complexe, il repose sur l’écoute et le partage des dessins mélodiques de ses trois protagonistes et sur leurs intuitions à remplir les espaces de chaque morceau.

mardi 10 novembre 2015

Souleance – Tartare EP (First Word Records)


Souleance – Tartare EP (First Word Records)

Souleance est un projet électro piloté à 4 mains depuis 2006 par les producteurs français Fulgeance et Soulist. Orienté vers les sonorités disco, soul, hip-hop et afro-latines, le duo nous offrait l’année passée son EP d’inspiration brésilienne Jogar d’où était extrait l’excellent Mais Um au groove tropicaliste low-club.

En juillet 2015 était publié chez First Word Records le single Secoue, annonçant la sortie de son dernier EP Tartare composé de 6 compositions + 2 remixes. Le titre combinait les rythmes haïtiens du kompa et ses accents cuivrés à la puissance des loops et autres beats électroniques.

Cependant avec le second extrait Hustle, Souleance nous éloigne des tropiques et nous plonge dans les profondeurs abyssales d’un disco instrumental moite et entrainant façon 80’s, on y remarque en featuring Emile Sacre alias Vect aux claviers et vocoder.

Le titre éponyme est de la même trempe, efficace et racé avec une ligne de basse hypnotique et redoutable. Le producteur breton Débruit, auteur du célèbre Nigeria What ?, s’en empare et nous livre un remix « au couteau » plutôt dark avec ses percussions afro et son synthé new wave.

Ratatouille est une véritable bombe stroboscopique, mixant cuivres synthétiques festifs et claviers psychédéliques à la façon de Todd Terje dans It’s Album Time.

I Got It est sans doute le morceau le plus sensuel de l’EP avec son kit de batterie au grain analogique, ses samples vocaux subjectifs hérités d’Ohio Players et sa touche disco house planante…

New York, ou la perle de Tartare, nous rappelle le pur son façonné par le mythique duo nu-disco de Brooklyn, Metro Area, il est remixé par l’allemand Uffe qui orchestre une version piano house des plus pertinentes, m’évoquant le récent disque electro jazz The Radicle de l’anglais Tim Deluxe.

Bref, Souleance confirme sa dextérité en cuisine, après les amuse-bouches il ne lui reste plus qu’à nous concocter un album aux petits oignons…

 

Angie Stone – Dream (Shanachie)


Angie Stone – Dream (Shanachie)

La diva Angie Stone, une des figures emblématiques de la scène néo-soul depuis 1999 et la parution de Black Diamond, nous revient avec un septième opus intitulé Dream. Né sous l’impulsion du producteur Walter W. Millsap III (Mariah Carey, Jennifer Lopez, Alicia Keys ou Brandy), le projet veut remettre en lumière la vie d’une artiste (aux 2 disques d’or et aux 3 nominations aux Grammy Awards) hors paire et son lègue souvent déprécié au monde de la black music. Rappelons à ce sujet qu’à la fin des années 70 elle comptait parmi les pionnières du hip-hop féminin avec son trio The Sequence et leurs titres old school comme Funk You Up paru sur le label de Sugar Hill Gang en 1979, Monster Jam en 1980 ou Funky Sound (Tear The Roof Off) l’année suivante.

Dream se compose de 10 titres aux reflets soul sucrés et délicats, la voix puissante et sensuelle d’Angie (qui baigna toute son enfance dans le gospel) est toujours aussi touchante et efficace, on en prend conscience dès l’ouverture très orientée R&B Dollar Bill, qui nous convie sur le dancefloor en mode ondulations et petits pas langoureux.

Dave Hollister la rejoint sur le brulant Begin Again dont l’ambiance ouatée ne s’apprécie pleinement qu’en position horizontale (comme le titre éponyme d’ailleurs), puis le rythme s’accélère avec Clothes Don’t Make a Man, révélant la facette rétro-soul de l’ex de D’Angelo (un retour aux sources audible aussi dans l’énergique Quits). C’est justement de sa relation avec le chanteur qu’elle traite dans la touchante ballade Forget About Me, où comme dans Magnet, Think It Over ou 2 Bad Habits elle ré-explore les sonorités et le groove de ses débuts, que Mahogany Soul en 2001 et Stone Love en 2004 ont indélébilement gravés dans l’histoire de la soul contemporaine.

Angie Stone, auteur, interprète, productrice et actrice revient donc sur le devant de la scène, plus apaisée et sereine que jamais ! Ses relations houleuses avec sa fille Diamond se normalisent et son fils Michael (dont D’Angelo est le père), décrit comme un excellent rappeur, se promet à une belle carrière. Sa foi inébranlable et sa force de caractère l’ont aidé à surmonter les épreuves de la vie, abimée par des émissions de téléréalité, la cinquantenaire pourrait être très prochainement le sujet d’un biopic produit par Jamie Foxx !